Oui ! bien chers amis, la Saint-Valentin devrait être
baptisée « la fête de la sexualité et de la vie affective ». C’est
l’intuition que j’ai eu quand j’ai été convié à donner une conférence dans le
cadre de la saint-valentin ce 14 février 2019. C’est vrai que les avis sont
partagés quand je fais un petit sondage par rapport à la vision des gens sur
ladite fête. Certains m’ont dit que c'est une fête purement commerciale tandis
que d'autres ont plutôt à cœur cette fête de l'amour. Quoi qu'il en soit, la Saint-Valentin
ne laisse personne indifférent que vous soyez en couple ou non. J’ai souvent
l’habitude de suggérer d’ailleurs à mes client(e)s qui sont en couple de ne pas
l’oublier totalement. Parce que presque plus d’un mois, les boutiques sont
remplies au rouge et ornées de cœurs. Il serait quand même bienséant de dire une
« Joyeuse Saint-Valentin mon amour ! » à sa conjoint(e) bien-aimé(e) plutôt que
de laisser ce moment totalement inaperçu.
Mais, pour les jeunes et adolescents qui ont besoin de
vraies informations utiles pour une éducation complète à la sexualité, chaque
parent, chaque éducateur doivent saisir l’occasion de la saint-valentin pour
rappeler et insister sur certains aspects de la vie affective et relationnelle.
C’est pourquoi ce numéro de l’Education Par le Cœur, propose des éléments qui
pourront être abordé par les éducateurs afin d’aider les jeunes à mieux se
développer sur tous les plans de leur personnalité.
1. La diversité des sources d’éducation
aujourd’hui
A l’ère de nos grands-parents, il existait pratiquement une
seule source d’éducation. Celle de l’autorité des parents et les valeurs de la
communauté. Quand le parent dit ; c’est la vérité et cela est confirmé par
la conformité à ce que la communauté à laquelle l’enfant appartient « dit ».
Quand, par exemple, le parent dit on ne balaie pas la nuit, rien ne viendra
contredit cette interdiction. L’enfant ne verra pas « un autre
parent » dans « Novelas », par exemple qui lui démontrera le
contraire. Ni une vidéo sur WhatsApp qui dira le contraire. En d’autres termes,
à l’époque de nos grands-parents, il n’y a pas de télévisons ou internet pour
confronter l’enseignement des parents. L’éducation en ce moment, était
essentiellement collective, fonctionnelle, pragmatique, orale, continue,
mystique (initiatique), homogène, polyvalente et intégrationniste. L’éducation
traditionnelle dispose de diverses méthodes éducatives telles que les contes,
les devinettes, les jeux, les rites d’initiation…
Aujourd’hui, nous sommes à l’ère de l’information.
L’information est disponible sous toutes ses formes. Nous sommes submergés
d’informations. Les enfants, les jeunes et adolescents sont rassasiés
d’information. La conséquence est que les méthodes éducatives d’alors ne sont
plus admises à notre époque. Plus d’initiation à la vie aux grandes étapes du
développement de l’enfant (première enfance, début de socialisation, l’entrée
dans la vie adulte). Les anciennes méthodes de mentorat et de tutorat ont
changé de formes. Le rythme de la vie a changé à tous les niveaux. L’ancien
n’est plus considéré comme le « sachant » en raison de la variété de
ses expériences. Nous vivons une époque différente. C’est peut-être ce constat
trivial qu’à fait la professeure Martine Abdallah-Pretceille (1997 : 123) de
l’Université Paris III, en disant que « les sociétés (actuelles) sont
structurellement hétérogènes, elles sont par ailleurs soumises à la rapidité
des mutations, à la diversité des références et, parfois même, à leurs
contradictions. Socialisation, enculturation, scolarisation, éducation se
déclinent désormais au pluriel (« Pour une éducation à l’altérité »
In Revue des sciences de l’éducation,
Vol. XXIII, n°1). Elle insiste dans le même document que l’étrangéité d’autrui
fait désormais partie du quotidien, soit directement par contact, soit
indirectement par les médias. Les enjeux futurs de l’éducation, formelle et
informelle, sont donc à définir par rapport à cette complexification et à cette
diversification croissante du tissu social et de l’expérience.
Ainsi, nous pouvons noter au moins trois sources
d’information qui influencent l’éducation que nous, parents donnons à nos
enfants de nos jours :
* l’influence des pairs ; les camarades d’école ou de lycée
interfèrent avec les informations que nous transmettons à nos enfants. Prenons cet
exemple banal. Ma voisine me dit qu’il a interdit à son enfant de ne plus
manger debout. « Un enfant bien éduqué, s’assoit bien à table pour
manger ». Son garçon (5 ans), répète la même phrase à son meilleur ami
Geordy à l’école. Geordy lui réplique que ce sont les paresseux qui prennent le
temps de s’assoir pour manger. Les travailleurs n’ont pas le temps de s’assoir
pour manger. Car, il faut manger vite pour avoir suffisamment du temps pour se
vaquer à autre chose. C’est ce qu’il a entendu dans son dessin animé préféré. L’enfant
de ma voisine devient confus par cette nouvelle de son meilleur ami. C’est en
ce moment qu’il commence par douter de tout ce que sa maman lui dit de la vie.
* l’influence de l’école ; le contenu de l’enseignement
reçu à l’école constitue aujourd’hui la source principale de l’éducation. A
cela, nous pouvons ajouter aussi la conviction personnelle des enseignants qui
peut parfois être contraire à l’éducation que les parents donnent à la maison.
* l’influence de la télévision et de l’internet ; les
enfants ont l’habileté des médias. L'internet, par l'intermédiaire du mail, des
réseaux sociaux, des listes de diffusions et du web, permet de diffuser une
masse phénoménale d'informations, instantanément et partout dans le monde. Il
se pose dans ce sens le problème de la validité de ces informations. Comment
vérifier les sources, ne pas être victime d'une rumeur contraire à l’éducation
transmise à l’enfant ? Difficile dans la mesure où la désinformation et la
rumeur, au-delà du simple canular, font maintenant partie intégrante de la
guerre économique. Avec le net, la rumeur, vieille comme le monde, trouve un
nouveau support très puissant. Les jeunes et adolescents sont exposés à tous
ces dangers qui détruit l’élan éducatif de base des parents.
Au regard de tout ce qui précède, il urge d’initier une
autre manière d’éduquer. Une éducation essentiellement basée sur les valeurs et
sur la responsabilité. Car « L’objectif de l’éducation est la connaissance des
valeurs et non des faits. » (William Ralph Inge).
2. Une éducation aux valeurs
La notion de valeur renvoie à tout ce qui est conforme à la
nature humaine, à l’être au monde, à l’être avec les autres et à la soif de
l’absolu. Or, la sexualité est définie comme l’ensemble des comportements
relatifs à l’instinct sexuel et à sa satisfaction (Le Petit Robert). Un
rapprochement entre les deux notions, m’amène à dire qu’une sexualité humanisée
est celle qui met en exergue des « comportements-valeurs » dans la
relation avec soi-même, avec les autres, avec le monde et avec le divin en soi.
Une éducation aux valeurs permet donc de développer des comportements-valeurs
chez l’être jeune. La saint-valentin est l’occasion idéale de rappeler les
valeurs du respect de la vie, les valeurs de l’entretien et de la préservation
du monde (cosmos) dans lequel nous vivons, celles de l’engagement pour le bien
de tous et celles de la soif de l’absolu.
L’éducation aux valeurs est une notion très étendue et peu
déterminé qui ne concerne pas seulement les enseignants et les parents. Elle
touche aussi le gouvernement et la société en général. Cependant, on ne lui
donne pas l’attention qu’elle mérite dans notre pays le Bénin. En fait, on la
met souvent de côté pour mieux favoriser la mémorisation de connaissances ou
l’apprentissage de matières.
L’éducation aux valeurs est nécessaire non seulement pour
les jeunes, mais aussi pour nous tous. Elle nous offre la possibilité de
réapprendre ce que nous n’avons pas appris de la meilleure façon. Il est essentiel
d’instaurer qu’une journée qui parle et transmet des valeurs. Et il est indispensable
qu’elle soit incluse dans n’importe quelle autre fête à envergue populaire
telle que la saint-valentin. Ce type d’éducation devrait être présent dans tous
les foyers et dans la société en général.
L’éducation aux valeurs aidera les parents et les éducateurs
à :
- développer chez les jeunes, un esprit critique à propos
des habitudes de consommation des produits des réseaux sociaux et de l’internet.
- souligner l’égalité des chances, indépendamment de la classe
sociale, de la culture, du sexe, de la nationalité ou de la religion.
- enseigner des normes pour traiter l’environnement avec
précaution, en évitant de l’endommager et en sachant apprécier sa valeur.
- transmettre une tolérance par rapport à la sexualité des
autres.
Elle encourage une consommation responsable (de l’information)
en dotant les gens d’outils qui permettent de faire des choix conscients.
Je vais emprunter une autre définition de la sexualité à l’Organisation
Mondiale Santé pour pouvoir introduire la notion de responsabilité. Selon l’OMS,
la sexualité « est l’intégration des aspects somatiques, émotionnels,
intellectuels et sociaux de l’être humain sexué, de façon à parvenir à un
enrichissement et un épanouissement de la personnalité, de la communication et
de l’amour ». C’est une définition qui prend en compte l’intégralité de l’être
humain. Les spécialistes en la matière parlent de l’unité bio-psycho-sociale de
la personne. L’unité bio-psycho-sociale implique donc une configuration vers le
sexuel qui favorise l’épanouissement de la personnalité. Cette définition souligne
trois aspects de l’Homme : aspects biologiques, aspects psychologiques et
aspects sociaux. Ces aspects font référence aux besoins fondamentaux de l’Homme.
Ce sont les besoins physiologiques (dormir, boire, se nourrir, se vêtir, bouger…),
les besoins psychologiques (autonomie, compétence et appartenance sociale) et
les besoins relationnels.
L’éducation Par le Cœur promeut une éducation axée sur les besoins.
C’est-à-dire apprendre à identifier et à prendre en charge ses besoins et ceux
des autres de façon positive. Pour moi donc, une éducation à la responsabilité
est celle qui prend en compte ses propres besoins et ceux des autres. Le jeune
ou l’adolescent ne pose plus un acte seulement parce que papa ou maman lui ont
dit d’agir ainsi, mais il agit parce que ce qu’il fait, répond à un besoin qui
respecte la nature humaine, l’être au monde, l’être avec les autres et la soif
de l’absolu.
Les besoins physiologiques sont des besoins de survie liés à
la nature humaine comme respirer, se nourrir, dormir, se loger… Naturellement
tout individu cherche à satisfaire les besoins physiologiques fondamentaux ;
toutefois nous ne portons pas sur ces besoins la même appréciation. Cette
différence d'appréciation peut engendrer une situation qui sera jugée non
satisfaisante pour la personne et à son tour le besoin à satisfaire fera naître
une motivation pour la personne. Les besoins de l’enfant, comme ceux de tout
être humain, sont des besoins qui sont une réelle nécessité. Ils sont
indispensables à la vie. Chez l’enfant, le néocortex, centre de la raison,
n’est pas encore pleinement mature. Par conséquent, le non-respect des besoins
de l’enfant se transforme très rapidement en comportement inapproprié voire en
crise de colère. Le principe de l’Education Par le Cœur consiste à apprendre à
être en contacte avec soi-même pour mieux se comprendre et comprendre mieux son
interlocuteur. La mission des parents et des éducateurs dans ce cas est d’aider
le jeune et l’adolescent à verbaliser dans un langage adéquat ses besoins dans
le respect de soi et des autres. Oui ! je consens que c’est du travail,
une nouvelle éducation pour certains adultes-éducateurs mais en fin de compte
tout le monde y gagne et notre monde ira de mieux en mieux.
La théorie des besoins psychologiques fondamentaux a été
développée par les psychologues Edward L. Deci et Richard M. Ryan, professeurs
de psychologie à l’université de Rochester (USA). Les travaux de ces auteurs
inspirent un nombre de recherche croissant depuis plus d’une dizaine d’années
dans le champ éducatif, aussi bien dans le contexte familial qu’en milieu
scolaire et universitaire. Elle s’inscrit dans le cadre de la théorie de
l’autodétermination (self-determination
theory), qui permet de mieux comprendre les différentes facettes de la
motivation, ainsi que ses liens avec l’apprentissage et la réussite scolaire.
Deci & Ryan (2002) proposent une théorie du bien-être
psychologique fondée sur le postulat que les êtres humains ont des besoins
psychologiques fondamentaux. La satisfaction de ces derniers constitue le
mécanisme essentiel qui détermine la santé psychologique et le fonctionnement
optimal des individus, enfants ou adultes. Ils identifient trois besoins
fondamentaux :
Le besoin de compétence, le besoin d’autonomie et le besoin
d’appartenance sociale (relatedness).
D’après les tenants de la théorie d’autodétermination (TAD), l’humain, d’une
façon innée, tend à satisfaire trois besoins psychologiques fondamentaux, à
savoir le besoin d’autonomie, le besoin de compétence et le besoin d’être en
relation à autrui (Deci & Ryan, 2000, 2002, 2008).
L’autonomie réfère au sentiment d’être à l'origine ou à la
source de ses actions, de sorte que le sujet soit en congruence avec ses
actions et qu’il les assume entièrement (deCharms, 1968 ; Deci & Ryan,
1985).
La compétence réfère à un sentiment d’efficacité sur son
environnement (Deci, 1975 ; White, 1959) ; ce qui stimule la curiosité, le goût
d’explorer et de relever des défis.
Le besoin d’être en relation avec autrui, implique la perception
de l’affiliation et le sentiment d’être relié à des personnes qui sont
importantes pour soi (Baumeister & Leary, 1995 ; Ryan, 1993).
Dans la méthode E.S.P.E.R.E. de Jacques Salomé, il définit sept
(7) besoins relationnels qui sont : le besoin de se dire, le besoin d'être
entendu (dans le même registre), le besoin d'être reconnu, le besoin d'intimité,
le besoin d'être valorisé, le besoin d'influencer son environnement, de créer
et le besoin de rêver. La prise en charge de ces besoins dispose à écouter et à
mieux apprécier ce que notre interlocuteur nous propose comme nouvelle manière
d’agir pour son bien et celui de tous. Voici une charte de vie relationnelle
qui permet de nourrir la vie en nous et autour de nous. Je recommande aux
éducateurs de vivre cette charte inspirée des travaux de Salomé et d’enseigner
aux éduqués pour la paix en nous et dans notre monde :
— 1- Quelle que soit mon âge, quel que soit ma particularité
par rapport aux autres enfants, j'ai besoin d'être reconnu comme une personne.
— 2- J'ai aussi besoin d'être valorisé, gratifié dans ce que
je fais.
Oui, j'ai besoin que quelqu'un me renvoie de temps en temps
une image positive, pour dépasser mes limites.
— 3- J'ai besoin d'être informé, consulté parfois, pour tout
ce qui concerne ma croissance et les projets me concernant.
— 4- J'ai besoin d'un positionnement clair, constant et
cohérent de la part des personnes en autorité, pour tout ce qui touche à mes
devoirs (mes engagements envers ma famille, l'institution ou la société dans
laquelle je vis).
— 5- J'ai besoin également d'un positionnement sans
ambiguïté sur mes droits. Je ne veux pas être l'objet de la fluctuation des
désirs et des peurs de chacun, au moindre malentendu, à la moindre divergence,
à la moindre maladresse ou au moindre incident.
— 6- J'ai besoin que mon point de vue soit entendu, même
s'il n'est pas toujours retenu, ou pris en compte.
— 7- J'ai besoin de rendre compte de mes efforts de perfection
et d'avoir une écoute pour en évaluer les possibles.
— 8- J'ai besoin d'être passionné dans ma vie, d'avoir des
buts, des projets et même de conserver la possibilité de rêver à des
changements.
Si chacun de ces points peut être entendu et vécu dans mon
foyer et dans mon lieu d’éducation, vous pouvez être assuré que je collabore au
maximum.
Je sais que le cadre d’un simple article sur la question de
la sexualité et de la vie affective ne suffit pas pour décortiquer tous les aspects
d’une éducation complète à la sexualité. Néanmoins je reste convaincu que plusieurs
éléments évoqués dans ce poste peuvent servir de pistes de recherches
approfondies. La littérature scientifique au sujet de la sexualité et de la vie
affective est abondante et il faut plusieurs mois voire plusieurs années de
travaux pour arriver à une synthèse. Pour ma part, l’Education Par le Cœur est
un outil utile pour mettre en œuvre des comportements permettant de retrouver
un équilibre émotionnel et limiter les émotions et comportements déviants. Ses
principes compris et utilisés régulièrement, facilitent le développement de
l'estime de soi dans sa capacité à interagir avec l'autre et un état d'esprit
positif.
COMLAN Bernard
Psychologue et Coach de Vie
Consultant en Psychologie Positive
(00229) 95 28 99 85/(00228) 93 95 56 33